Le vivier d’élus LR tente la macronie
Si le patron des Républicains a ainsi insisté sur la ligne du parti, c’est qu’elle ne va visiblement pas d’elle-même au sein de ses propres troupes. Jean-François Copé, ex-ministre de Jacques Chirac, et Jean Rottner, président de la région Grand Est, défendent depuis la présidentielle la thèse d’une alliance avec le président de la République. Et les tenants de cette position se voient conforter par le relatif succès de LR aux législatives. Avec 61 députés pour Les Républicains et environ 70 en comptabilisant les apparentés et l’UDI, la droite parvient à gagner un rôle enviable de pivot dans la nouvelle Assemblée nationale.
Boussole et non béquille
C’est parmi ces élus que la majorité présidentielle désormais toute relative va tenter de trouver la quarantaine de voix qui lui manquent. Quelques semaines seulement après l’échec cuisant de Valérie Pécresse à la présidentielle, certains cadres veulent faire fructifier très vite cette fortune inattendue. “Nous devons être une boussole, pas une béquille de la majorité”, espère déjà un poids lourd LR. Avec pour objectif d’imposer un agenda de droite au nouveau gouvernement. Christelle Morançais, présidente LR de la région Pays de la Loire, livre même un mode d’emploi précis – en opposition avec le refus d’alliance répété par Christian Jacob: “Nous devons bâtir avec Emmanuel Macron un contrat de gouvernement, qui doit être négocié de A à Z et qui doit porter sur des priorités essentielles, comme remettre l’école au cœur de notre République, redresser notre économie et nos comptes publics, faire la réforme des retraites, garantir la sécurité partout et pour tous, réindustrialiser la France…”
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Le raisonnement compte des partisans parmi les nouveaux députés. Philippe Juvin, candidat à la primaire LR, qui fait son entrée au Palais-Bourbon, évoque depuis plusieurs semaines l’idée d’une coalition à l’allemande. Le nom du chef de service des urgences de l’hôpital européen Georges-Pompidou, rendu célèbre pour ses critiques au scalpel du pouvoir pendant la crise du Covid, circule d’ailleurs comme prochain ministre de la Santé d’un potentiel gouvernement d’ouverture.
“Il existe deux solutions après les élections législatives, renchérit Alexandre Vincendet, maire LR de Rillieux-la-Pape, qui vient de faire basculer à droite la 7e circonscription du Rhône. La première, irresponsable, consisterait à bloquer les réformes, à freiner les décisions. La seconde, que je défends, postule que les Français attendent de leurs élus qu’ils apportent des solutions à leurs inquiétudes. C’est pour cela que, lorsque les textes proposés s’avéreront conformes à mes convictions, je les voterai. Pas question que je me comporte comme un bourrin de l’opposition!”
Opposition “responsable”
Des stratèges de la droite, qui ont déjà été recrutés par la Macronie, dénombrent dix à vingt élus partageant peu ou prou cette philosophie dans l’ensemble LR-UDI. Insuffisant pour offrir une majorité au président, mais assez pour enfoncer un coin dans cette partie de l’opposition. L’Elysée surveille aussi la future élection du président du groupe LR à l’Assemblée pour jauger le poids des récalcitrants à la ligne Jacob: la députée de Haute-Savoie Virginie Duby-Muller, partisane d’une “opposition responsable”, a ainsi la préférence des macronistes.
Une chose est sûre, ces élus de droite minoritaires vont trouver face à eux leurs propres collègues en rangs serrés. “Nous n’avons pas vocation à être la roue de secours d’un pouvoir qui a échoué”, lance Eric Ciotti, qui a bagarré pour se maintenir à l’Assemblée. Même tonalité pour Aurélien Pradié, député du Lot et lui aussi pressenti pour concourir à la présidence du groupe LR: “On ne m’oblige pas à discuter ou à rentrer dans un pacte de gouvernement avec des hommes et des femmes qui ont un projet de société différent du mien, a lâché ce dernier sur RMC le 20 juin. Donc il n’y aura pas de mariage forcé. Nous ne gouvernerons pas avec Emmanuel Macron.” A peine relevé de ses cendres, le phénix LR brûle déjà des feux de la division.
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